Du guide de bonnes pratiques au standard mondial : la norme ISO en langage juridique clair

Notre associé Clément Camion a contribué à la rédaction de la première norme ISO sur le langage juridique clair. Retour sur deux ans de travaux qui offrent enfin des critères objectifs aux organisations.


En juin 2023, Clément Camion se retrouve dans les locaux de la Commission européenne à Bruxelles, entouré des plus grands experts mondiaux du langage clair. Il vient tout juste d'être nommé expert canadien au comité ISO/TC 37.

Clément devant Commission européenne

Deux ans plus tard, son travail porte ses fruits : la norme ISO 24495-2:2025 sur le langage juridique clair est publiée en août 2025, d’abord en anglais puis quelques semaines plus tard en français.

Pour la première fois, des experts du monde entier s'entendent sur des critères objectifs pour clarifier la communication juridique.


Quand le Québec et le Canada s’invitent à la table des "rock stars" du langage clair

Cette aventure a commencé par un coup de fil et quelques courriels envoyés au Conseil Canadien des Normes. Quelquessemaines plus tard, Clément était à Bruxelles pour le lancement des travaux :

« J'ai rencontré toutes les sommités du langage clair.  La génération qui a porté cette cause et dont j'ai lu les articles de nombreuses fois. J'ai fait une publication à l’époque en disant : j'ai rencontré les géants, ils sont sympas et on peut même prendre des bières avec eux! »

Clément en compagnie de Annetta Cheek, son mari Charles, et Nancy Smith

Ce moment d'émerveillement s'est rapidement transformé en marathon intellectuel. Pendant plusieurs mois, le comité de rédaction s'est réuni virtuellement toutes les semaines ou toutes les deux semaines, jonglant avec les fuseaux horaires de la Norvège, du Canada et des États-Unis, et de l’Australie..

Plus de 1000 commentaires à traiter : le défi du consensus international

Le processus de création d'une norme ISO est très contraignant, et c’est ce qui le rend rigoureux : chaque version du document est soumise à des rondes de commentaires provenant d'experts et de pays membres. La norme elle-même doit suivre des exigences de rédaction très précises - exigences qui ne sont elles-mêmes pas très langage clair, et qui rendent les experts du langage clair assez malheureux. Tout au long du processus, chaque commentaire doit être analysé, discuté, et intégré dans le libellé de la version suivante. Si le comité refuse un commentaire, il doit fournir une réponse justifiée. Chaque version subit ensuite un vote d’approbation avant de passer à la version suivante et à une ronde de consultation plus large. Une tâche colossale qui a mis l'équipe à l'épreuve.

« Il y avait tellement de commentaires! On a réussi grâce à la force du groupe. On a tellement travaillé ensemble qu'on était content de se revoir à chaque fois. » souligne Clément.

C'est cette rigueur qui fait la valeur d'une norme ISO. Les perspectives de nombreux paysse sont mêléespour établirdes principes universels applicables à toutes les langues et à tousles systèmes juridiques.

De l'artisanat au standard reconnu : l’impact d’une norme ISO

Des guides de rédaction en langage clair existent déjà dans plusieurs organisations. Alors pourquoi investir autant d'efforts dans une norme ISO?

« Un guide de rédaction ou de bonnes pratiques, c’est le signe qu’une organisation a choisi de prioriser le langage clair dans ses propres stratégies. Mais juridiquement, ça ne vaut pas grand-chose dans la hiérarchie des normes. C'est simplement un outil qui circule. Alors qu'une norme ISO, c'est un standard sur lequel les experts du monde entier se sont entendus en disant : ça, c'est le minimum pour prétendre se qualifier dans un certain domaine. La norme ISOvalide l’importance du langage clair dans le monde juridique. " précise Clément.

Cette reconnaissance internationale a un impact concret : elle rend le langage clair incontournable dans le milieu juridique.

La norme ISO permet notamment d’interpréter les obligations de langage clair qui sont prévues de manière assez générale dans les lois et règlements. Que ce soit pour l’administration publique, en matière de contrats de consommation, ou bien pour certains documents financiers précis.

À qui s'adresse cette norme la norme ISO 24495-2?

La norme ISO 24495-2 n'est pas obligatoire – c'est une norme d'application volontaire. Aucune organisation n’est habilitée à certifier qu’un document ou une organisation respecte la norme ISO sur le langage clair (des travaux sont en cours à ce sujet).

Néanmoins, cette norme est une référence essentielle pour plusieurs types d'organisations.

« Toutes les organisations qui ont soit l’obligation, soit la vision stratégique de communiquer en langage clair avec leurs usagers ou leurs clients devraient s'y intéresser. Au minimum, partager la norme à leur équipe de révision linguistique interne, leur équipe de traduction... et j'espère à leur équipe juridique. », conclut Clément.

L'intérêt est particulièrement fort pour les organisations qui ont des obligations réglementaires de communiquer en langage clair :

  • Contrats d'adhésion de consommation (Code civil du Québec)

  • Prospectus en valeurs mobilières

  • Contrats d'assurance

  • Formulaires administratifs

Jusqu'à maintenant, ces obligations existent dans la loi, mais sans définition de ce qu'est réellement un document « en langage clair ». La jurisprudence est presque silencieuse sur le sujet. La norme ISO comble ce vide.

Un complément essentiel à la norme générale

La norme ISO 24495-2 ne se lit pas seule. Elle complète la norme ISO 24495-1:2023 qui établit les principes fondamentaux du langage clair pour tous les types de communications.

Comme cette norme complète la première norme langage clair, il est recommandé de lire les deux puisqu'elles se complètent. Plusieurs principes dans la première norme sont également applicables dans les communications juridiques.

La partie 2 ajoute des considérations spécifiques au droit telle que :

  • comment gérer la précision juridique tout en restant clair

  • comment adapter les principes aux différents types de documents juridiques

  • comment tester la clarté auprès des utilisateurs finaux.

Prochaine étape : retour à Bruxelles

Le travail de Clément ne s'arrête pas à la publication de la norme. Fin octobre, il retournera à Bruxelles pour présenter les travaux du comité lors d'une conférence de trois jours organisés conjointement par Clarity, Plain et le Parlement européen.

À son retour, il souhaite poursuivre un travail de diffusion pour faire connaître la norme aux organisations québécoises et canadiennes.

Conclusion

Après deux ans de travail acharné impliquant des experts de dizaines de pays, la première norme ISO mondiale sur le langage juridique clair est maintenant disponible en anglais et en français.

Pour les organisations québécoises et canadiennes qui jonglent avec des obligations de communication claire ou qui veulent simplement améliorer l'expérience de leurs clients, cette norme offre enfin des critères objectifs et une méthodologie validée internationalement.

Le langage clair en droit n'est plus qu’un concept optionnel. C'est maintenant un standard reconnu mondialement.

 

Pour aller plus loin

Votre organisation a-t-elle des documents juridiques qui bénéficieraient d'être simplifiés selon cette nouvelle norme internationale?

Contactez En clair pour en discuter : achats@enclair.ca

La norme ISO 24495-2:2025 est disponible via Standards Canada ou directement sur le site de l'ISO.

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Bruxelles, siège de la Commission européenne

 
 
 

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